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3 octobre 2023 2 03 /10 /octobre /2023 10:31
La gauche libre
À Bram, dans l’Aude, une gauche unie retrouve l’esprit festif et tolérant sans lequel il n’y a pas de reconquête possible
Laurent Joffrin
Bizarre, étrange… Une réunion unitaire de la gauche sans invectives, sans anathème, sans caporalisation agressive.
Incongru, voire lunaire… Un débat entre socialistes, écologistes, radicaux ou communistes, sans excommunication, sans tweet assassin, sans insulte, où l’on ne traite pas l’autre de Doriot, où l’on ne profère pas de menace ou de chantage, où l’on essaie de comprendre et non de faire des procès.
Ce week-end, à Bram, dans l’Aude, c’était une réunion de la gauche sans les Insoumis. Donc, une réunion civilisée.
Pour la troisième année consécutive, Carole Delga, présidente de la région, réunissait la gauche réformiste à Bram, petite commune au cœur de l’Occitanie et de l’Aude rebelle, sous les auspices de Jaurès, le voisin essentiel. Chacun a joué sa partition, Riss de Charlie s’inquiétant du retour de Dieu en politique, épaulé par Henri Pena-Ruiz, philosophe de la laïcité et repris au vol par Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur et des cultes, délivrant une leçon de républicanisme ferme et tolérant.
Avec eux, des radicaux, dont Guillaume Lacroix, tribun héritier de Clemenceau et Mendès, rappelant leur attachement à une gauche de l’universalisme, des communistes décidés à reconquérir les classes populaires sur la ligne de Fabien Roussel, des écologistes en pointe dans la lutte pour la campagne préservée et vent debout contre les autoroutes bétonnantes, Aurore Lalucq, députée européenne experte en fiscalité juste, Michaël Delafosse, socialiste apôtre de la gratuité des transports urbains qui change sa ville de Montpellier, retrouvant ses amis Nicolas Mayer-Rossignol ou Hélène Geoffroy, ou encore Didier Leschi, avocat d’une immigration accueillie et maîtrisée.
Le tout couronné par un discours d’une Carole Delga, qui se dit, in petto, « et après tout, pourquoi pas moi ? », et par un cassoulet de Castelnaudary, le meilleur de la région, dit-on, c’est-à-dire le meilleur de France, et donc du monde. En un mot, une gauche en liberté, conviviale et convaincue, qui a attiré près de 2000 personnes pour des agapes intellectuelles et des débats festifs, comme doivent l’être les banquets républicains de glorieuse mémoire.
Une gauche en liberté qui se manifeste aussi, aujourd’hui lundi : dans le même esprit, le Lab de la social-démocratie, cénacle d’une gauche du réel qui croit à l’idéal, dévoile son « programme fondamental », à la manière du SPD allemand, un programme qui contribuera, au fil du débat, à la formulation d’une doctrine d’aujourd’hui pour le socialisme en liberté, appuyée sur les valeurs de toujours, celle de la République, de l’écologie dans la justice et de l’émancipation dans la lucidité. Loin des miasmes qui empestent la NUPES sans cesse polluée par Jean-Luc Mélenchon, qui croit dominer la gauche et ne fait que la marginaliser.
 
 
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8 septembre 2023 5 08 /09 /septembre /2023 09:40

Comme une envie de parenthèse, de calme, comme un besoin de lucidité au moment de se dire « est-ce que je dois faire la couv’ de Playboy ? » ou « est-ce qu’au JDD, pour garder la ligne, la bonne solution c’est Lejeune ? ». Un jour au hasard, une info, une colère, une chronique. Comme un moyen de jeter rage et courroux avec l’eau du bain de mer.

Mardi 1er août.

Cher journal,
Il pleut.
Pas une de ces pluies estivales qui viendraient rafraîchir enfin un sol brûlé par la sécheresse galopante, gorger d’une eau salvatrice les champs arides et redonner le sourire aux agriculteurs marris de voir leurs épis flétrir en slow motion depuis des mois ; non, une bonne grosse pluie bien lourde, torrentielle par endroits, jusqu’à la crue à d’autres, au tsunami même si l’on regarde les images venues de Chine ou d’Italie… Jusqu’en France aussi, où, de Bagnères-de-Bigorre à Mauves, les intempéries ont laissé sans électricité des milliers de foyers dans l’Ardèche.

Il pleut et c’est tant mieux me direz-vous car si j’en crois les rapports successifs du GIEC (que personne ne comprend, au mieux, ou ne lit pas, au pire), le manque d’eau est criant : les nappes phréatiques se vident à la vitesse d’une passoire à nouilles ou au gré des pompes agricoles qui viennent puiser dans les bassines et les retenues collinaires, les édiles ferment le robinet de leurs administrés au lieu de couper le sifflet des climato-sceptiques, les campeurs voient leurs ablutions aux douches collectives minutées et se limitent à 2 (au lieu de 5) volumes d’eau pour un volume de Ricard dans le seul but d’économiser ce nouvel or.

Il pleut et c’est normal. Parfois il fait beau, parfois non. Même en plein été. Même à l’heure du dérèglement climatique. Ce n’est pas nouveau : quand la Comtesse de Ségur a publié Après la pluie, le beau temps, l’exploitation minière n’avait pas encore marqué à ce point le monde de son empreinte carbone indélébile. Quand le Général Eisenhower a dû attendre des jours et des jours que la pluie cesse pour enfin pouvoir débarquer sur les côtes de Normandie à pieds secs, il n’incriminait pas le trou dans la couche d’ozone libre qui retardait son D-Day ,que je sache.

Alors quand j’entends en ce premier jour du mois d’août qu’il pleut et que merde alors après le mois de juillet caniculaire qu’on vient de vivre c’est bien ma veine que ça tombe pile le jour où je pars en vacances tandis que la présentatrice météo nous rassure mollement en nous promettant le retour des beaux jours vers la mi-août avec un indice de confiance 3 sur l’échelle des promesses que les algorithmes ne peuvent pas tenir, je me dis que tout n’est qu’aporie jusqu’au facepalm permanent.

Sincèrement, comment peut-on à 20 heures traiter honnêtement les informations selon lesquelles fonte de la banquise, réduction du permafrost, dômes de chaleur, méga-feux et tornades tropicales en Suisse alpine sont la résultante de décennies d’inconséquence écologique (et économique) pour qu’ensuite vers 20h35 un météorologue de circonstance vienne cajoler le touriste (qui a failli mourir d’insolation dans la file d’attente du Parthénon ou des ruines de Pompéi) en lui disant que l’embellie est pour bientôt et qu’il se rassure il va pouvoir profiter pleinement de ses vacances en famille, qui dans des eaux méditerranéennes à la température de hammam, qui à 2000 mètres d’altitude par 19°, qui en sautant très haut et très loin dans une structure gonflable mal assurée.

Il pleut et c’est juste normal. À ceci près que dans notre aveuglement de grenouille qui fait la planche dans une casserole d’eau sur une plaque à induction thermostat 2, on oublie que les « normales de saison » ne sont que des statistiques, une « convention mathématique » définie « comme la moyenne des températures sur une période de 30 ans (…), révisée tous les 10 ans » et qui, en 2023, se base sur les relevés de températures de 1991 à 2020. La prochaine « mise à jour » prenant en compte la période 2001-2030, il y a fort à parier que les « normales » qui serviront de référence pour les prochains JO de Brisbane nous feront trouver tout à fait « acceptables » des 27 ou 28 degrés en plein hiver austral, parce qu’en-dessous des moyennes constatées dans un contexte de réchauffement exponentiel…

C’est anecdotique – quoi que -, mais je me souviens que dans les années 80 tandis que je végétais dans une adolescence castelroussine morne, on savait très bien que la date de la foire annuelle approchait parce qu’il faisait soudain très très mauvais au point de se croire transportés à Vierzon ou dans une autre bourgade où il ne fait pas bon grandir. En 2023, à Châteauroux, vers la fin mai, il a fait plus de 25 degrés, il n’a pas plu et les locaux prévoyants qui avaient sorti la polaire et le coupe-vent en ont été quittes pour une bonne suée en plus d’être ridicules.

Mais le ridicule, lui, ne tue pas.

Dominique Bry

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13 juin 2023 2 13 /06 /juin /2023 09:14

Voici un titre qui évoque à la fois la chaleur réconfortante du café et la fêlure, la cassure, la blessure : Thermos fêlé. Qu’est-ce qu’un thermos quand il est fêlé, quelle utilité a-t-il ? Il ne sert plus à rien. Sinon à montrer une certaine perfection factice avant de révéler la fragilité en son cœur.

L’expression vient en fait d’une citation du roman-monstre La Maison des feuilles de Mark Z. Danielewski, traduit par Claro : « un peu comme un thermos fêlé – impeccable extérieurement, mais dedans rien que du verre brisé ». C’est donc une comparaison : rester intact en apparence, mais être en miettes à l’intérieur. Une image qui s’applique à une société impavide devant certaines tragédies qui pourtant la rongent, « contre nous endurcis / observe cela tout autour le monde obscurci ». Mais qui concerne aussi la poète atteinte psychiquement et émotionnellement par les massacres, bien qu’intouchée, préservée physiquement : « que font les guerres, même si on ne les vit pas ». Enfin, le thermos fêlé, c’est aussi le poème. Derrière la constance de la forme, des strophes de onze vers à chaque fois, de vers libres oscillant entre huit et quinze syllabes, il y a des ruptures syntaxiques, des ellipses, des enjambements, des phrases interrompues, des incertitudes sur les mots. Des phénomènes qui montrent la fêlure du poème, affecté par ce qu’il dit : « les mots, n’y sont pour rien, ce sont nos responsables usages / mésusages, nos périphrases hypocrites ».

Le recueil se présente comme un journal intime, daté du 29 décembre 2014 au 19 mars 2015. Journal intime, c’est trompeur, car si la poète s’exprime, si elle partage quelques bribes de son quotidien, elle rend avant tout compte de l’actualité tragique de ces journées, de cette période. Le 29 décembre est un jour de crise politique en Grèce, pour un pays déjà durement marqué par une politique de rigueur économique qui frappe de plein fouet la population. On n’oublie pas que le 7 janvier 2015 a eu lieu l’attentat contre Charlie Hebdo et ses victimes, pour l’essentiel des civils, en particulier des artistes souvent âgés. Le 9 janvier commence en Arabie saoudite la peine de flagellation de l’écrivain et blogueur Raïf Badawi. Sans oublier la guerre civile en Syrie, en cours depuis 2011, les crimes de Boko Haram dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest. Et le nombre affolant de personnes sans abri, la haine qui s’exprime en France sous les formes abjectes de l’islamophobie, de l’antisémitisme, de l’antitsiganisme. Sans parler des réfugiés traversant la Méditerranée qui « en mer meurent, étrangers, seuls, sans nom ».

Le recueil est dédié « À ceux qui, sans nom, sans toit, sans paix, sans soins, sous les coups de la douleur, du froid, de la faim, du mépris, des oublis, de la haine, du feu, la lâcheté des pierres, des bombes, […] à ceux qui regardent le monde, entendent les cris du monde et la peur, […] recueillent violence sans nom se recroquevillent, et meurent ». Claude Favre poursuit sa mission d’« écouter le monde », comme le disait Jean-Philippe Cazier. C’est ce qu’elle fait avec une obstination désintéressée dans plusieurs de ses recueils, dont Vrac conversations (2013), Crever les toits, etc. / Déplacements (2018) et Sur l’échelle danser (2021), chroniqués sur Diacritik. Plus récemment, Ceux qui vont par les étranges terres les étranges aventures quérant (Lanskine, 2022) a connu un grand retentissement critique, suscitant des comptes rendus dans L’Humanité, Libération ou encore La Quinzaine littéraire. Claude Favre est en effet une voix qui compte et qui mérite d’être entendue.

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15 mai 2023 1 15 /05 /mai /2023 09:25
Saint-Brévin : le triomphe de la haine
Le maire voulait créer un centre d’accueil des réfugiés, l’extrême droite a réussi à le pousser à la démission. Et à faire reculer la république

Dans la France d’aujourd’hui, en principe vouée à l’état de droit et aux valeurs républicaines, la xénophobie paie. Yannick Morez, maire de Saint-Brévin, vient de démissionner de ses fonctions, lassé des attaques incessantes dont il a été victime pour avoir accepté d’accueillir sur sa commune un centre d’accueil des demandeurs d’asile.

Harcelé sur les réseaux, dénoncé par l’extrême-droite zemmouriste au cours de plusieurs manifestations ostensiblement xénophobes, menacé de mort, il a été victime d’un incendie criminel qui a frappé son domicile familial. De guerre lasse, se jugeant abandonné par les pouvoirs publics, soucieux de protéger sa famille, il a jeté l’éponge.

Ainsi la honteuse campagne menée contre lui par les amis d’Éric Zemmour et quelques autres groupuscules du même tonneau, a atteint un premier objectif : décourager le maire de la commune, c’est-à-dire faire prévaloir la force contre le droit.

Déjà, les mêmes activistes, par les mêmes moyens, avaient obtenu l’abandon d’un projet d’implantation de quelques familles étrangères dans la commune de Callac, dans les Côtes-d’Armor. « À Callac, on a gagné, à Saint-Brevin, on va gagner », scandaient les manifestants de Saint-Brévin, qui portaient des pancartes où l’on pouvait lire « Organisons la remigration des clandestins, délinquants et criminels étrangers », ce qui revenait à assimiler, dans le monde simplifié de l’extrême-droite, tous les demandeurs d’asile à des criminels.

Note d’ambiance : quand l’Assemblée nationale a rendu hommage, mercredi soir, au maire démissionnaire, les députés du Rassemblement national ont refusé de se lever.

Incident isolé ? Il faut craindre que non. En organisant de type de protestation, l’extrême-droite poursuit un but transparent. Aujourd’hui, la majorité des migrants qui arrivent en France sont conduits à se concentrer dans les quartiers périphériques des grandes villes. Ainsi se créent des ghettos de la misère dont chacun sait qu’ils produisent, comme toujours et partout, amertume, colère, délinquance et repli identitaire.

Seule une meilleure répartition des immigrés sur le territoire national pourra améliorer la situation. C’est précisément ce que veulent empêcher les factions xénophobes qui ont sévi à Callac et à Saint-Brévin et qui ne manqueront pas de réitérer leurs agissements ailleurs.

Toute amélioration de l’intégration des étrangers leur est insupportable : elle les priverait de leur thème de propagande favori. Et c’est à ces gens-là, ouvertement xénophobes et racistes, jouant la politique du pire, que l’inertie de l’État a offert une victoire.

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4 février 2023 6 04 /02 /février /2023 12:26

Quitter la cité géométrique des réponses pour les étendues sauvages du questionnement

Pourquoi tant d'inquiétude et si peu d'amour ?

(Jean Rousselot)

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5 janvier 2023 4 05 /01 /janvier /2023 21:19

À tous mes loupés, mes ratés, mes vrais soleils Tous les chemins qui me sont passés à côté À tous mes bateaux manqués, mes mauvais sommeils À tous ceux que je n'ai pas été Aux malentendus, aux mensonges, à nos silences À tous ces moments que j'avais cru partager Aux phrases qu'on dit trop vite et sans qu'on les pense À celles que je n'ai pas osées Oh, à nos actes manqués Aux années perdues à tenter de ressembler À tous les murs que je n'aurais pas su briser À tout c'que j'ai pas vu tout près, juste à côté Tout c'que j'aurais mieux fait d'ignorer Au monde, à ses douleurs qui ne me touchent plus Aux notes, aux solos que je n'ai pas inventés Tous ces mots que d'autres ont fait rimer et qui me tuent Comme autant d'enfants jamais portés Oh, à nos actes manqués Aux amours échouées de s'être trop aimé Visages et dentelles croisés, juste frôlés Aux trahisons que j'ai pas vraiment regrettées Aux vivants qu'il aurait fallu tuer À tout ce qui nous arrive enfin, mais trop tard À tous les masques qu'il aura fallu porter À nos faiblesses, à nos oublis, nos désespoirs Aux peurs impossibles à échanger Oh, à nos actes manqués Nos actes manqués Nos actes manqués À nos actes manqués

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26 décembre 2022 1 26 /12 /décembre /2022 11:57

Il faut mourir, je mourrai : ce ne sera pas une grosse perte pour l'univers;  et d'ailleurs, moi même, je commence à m'ennuyer passablement en ce monde. Je suis comme un homme qui baille à un bal et qui ne rentre pas se coucher uniquement parce que sa calèche n'est pas encore là....

Un héros de notre temps

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19 décembre 2022 1 19 /12 /décembre /2022 19:10

Joli oxymore

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9 décembre 2022 5 09 /12 /décembre /2022 10:13
« L’intelligence n’est pas affaire de diplômes. L’intelligence est la force, solitaire, d’extraire du chaos de sa propre vie la poignée de lumière suffisante pour éclairer un peu plus loin que soi, vers l’autre là-bas, comme nous, égaré dans le noir », Christian Bobin
 
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16 septembre 2022 5 16 /09 /septembre /2022 08:37

par Mathieu Lindon

publié le 1er octobre 2022 à 4h55
 

Si j’ai bien compris, c’est curieux de tant différencier le travail et l’assistanat car le travail, le plus souvent, est l’assistanat du patron (ou des actionnaires). En revanche, déléguer est le plus souvent l’apanage du patron alors que pas mal de travailleurs ne cracheraient pas dessus, dans leur grande générosité et solidarité – c’est une manière de partager le travail qui fait l’affaire. «Là, je dois y aller, alors à toi.» Ou, chez les enfants : «Tu as fait tes devoirs, mon chéri ? – Non, j’ai délégué.»

Dans un monde idéal (pour certaines ou certains), même le devoir conjugal pourrait être délégué : «Lundi, c’est Ravioli.» Mais c’est un peu fort de fort de faire passer les prétendus assistés pour des planqués, des resquilleurs qui viennent manger le pain des crétins ramant au front trente-cinq heures par semaine jusqu’à on ne sait plus quel âge. Et voilà qu’il est question de travailler plus pour travailler plus et accéder à l’eldorado de la retraite à taux plein. Mais déjà le taux est plein, on en a plein le taux, maintenant qu’on a mangé la brioche jusqu’à la dernière miette et que la bise se pointe avec son cortège de fourmis irritantes qui regardent du coin de l’œil la retraite à 107 ans comme une perspective somme toute accessible, si le gouvernement a bien consulté.

 

Pendant les confinements, on a beaucoup parlé de ceux qui étaient au charbon, dans le cambouis jusqu’au cou – en première ligne. Sont moins évoqués ceux qui sont en dixième ligne, en cinquantième ligne (on ne sait pas où ça s’arrête), ceux qui ont un rapport proche avec l’argent mais éloigné avec le travail. Etre assisté, ce serait une honte, mais être rentier, c’est une chance. Si les chômeurs devaient répondre à tout ce qu’ils se prennent sur la gueule, ils ne chômeraient pas.

La durée n’est pas tout, la question est plutôt : «Comment donner sens et réjouissance au travail ?» Dans l’idéal, on aurait le droit d’aller au turbin en maillot de bain (pour pouvoir profiter de la piscine, du solarium et des massages pendant les pauses). On aurait en arrivant la bonne blague du patron qui viendrait vous embrasser en vous offrant un croissant et un chocolat chaud. Ce serait tellement la belle vie qu’on ferait la grève du week-end sans mettre l’entreprise en péril puisque les heures supplémentaires ne seraient pas payées. Ce serait l’anti-télétravail : on aurait le droit de dormir sur place et on pourrait faire des fêtes avec les collègues, en plus des deux siestes quotidiennes (éventuellement crapuleuses) encouragées par l’encadrement. Les petits malins auraient trois-quatre boulots, et les syndicats, toujours jusqu’au-boutistes, exigeraient des gâteaux, du pâté, du nectar, de l’ambroisie et de la guimauve. Les relations amoureuses entre collègues seraient récompensées avec l’élection du couple du mois.

Les policiers joueraient à chat avec les manifestants. Le personnel surnuméraire des hôpitaux vous ferait la causette en même temps que manucure et pédicure, tandis que le chef cuisinier viendrait discuter des menus. «Alors, qu’est-ce qui vous ferait plaisir aujourd’hui ? On a un turbot magnifique. Mais si monsieur préfère le gibier!» Quant aux pauvres gens contraints de partir à la retraite avant d’être vraiment HS, ils auraient toujours le bénévolat pour ne pas déprimer. Et, si j’ai bien compris, le bonheur des uns faisant le bonheur des autres, les usagers et les clients seraient accueillis comme des amis, comme la famille, dans toutes les administrations, tous les cafés, tous les taxis.

Le "quiet quitting", nouvelle norme au travail?

Faire le strict minimum, refuser les heures supplémentaires ou de nouvelles responsabilités. C’est ce qu’on appelle le “quiet quitting” (démission silencieuse en français). Popularisé sur les réseaux sociaux par les jeunes générations, ce phénomène témoigne d’une volonté d’un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle.

 
🔍 “Mes heures, ce sont mes heures. Je disais beaucoup oui pour rendre service à mes collègues. Maintenant, c’est fini”, explique Sandrine*. Démotivée par le manque de reconnaissance de sa hiérarchie, cette chargée de mission RH a tout simplement “levé le pied”. “J’avais toujours trop de travail. Pourquoi faire un sprint alors que c’est un marathon? On travaille pendant 40 ans dans sa vie”, ajoute Alexandre*. Au bord du burn-out, cet ancien manager commercial a lui aussi décidé de limiter ses horaires pour se consacrer au sport et à sa famille. 

👉 Une prise de recul par rapport au travail aussi appelée “quiet quitting” (démission silencieuse en français). Le phénomène n’est pas nouveau mais a été popularisé sur les réseaux sociaux par les jeunes générations. “Aujourd’hui, le travail peut facilement contaminer la vie personnelle avec les emails sur le téléphone, le travail à distance… explique la psychologue du travail Diane RAKOTONANAHARY. Cela peut engendrer beaucoup de souffrance”. 

👉 Pour beaucoup, la priorité est donc de remettre des frontières entre vie professionnelle et personnelle. Un mouvement que de nombreux spécialistes des ressources humaines soutiennent. “Ne pas répondre à ses mails le week-end n'a rien d'une démarche démissionnaire!”, s’étonne ainsi la recruteuse Céline JAUNEAU. Les moins de 30 ans veulent “pouvoir avoir une vie à côté, dans des domaines avec des valeurs et du sens auxquels ils croient”, ajoute Loïc DOUYERE, directeur associé de l’institut RH Florian Mantione. 

👉 La crise climatique et énergétique expliquerait aussi cette évolution. Quatre salariés sur dix disent ressentir un décalage entre leurs convictions personnelles et leur quotidien en entreprise, selon le dernier baromètre /Kantar. 75% d’entre eux seraient ainsi “désengagés”.  “L’accumulation d’événements d’une ampleur inédite (...) provoque une prise conscience et transforme en grande profondeur la relation du travail aux individus”, analyse le DRH Dominique DIETRICH

👉 Certaines entreprises se sont emparées du sujet. “Cloisonner vie pro et vie perso n'est pas la meilleure réponse, détaille ainsi Cécile Staehle, en charge des ressources humaines chez Troopers Web Republic. Nous avons plutôt pensé notre culture d'entreprise pour qu'elle permette autant que possible de concilier ces deux parties de notre vie”. Actions en faveur de la parentalité, autogestion, transparence, management à l’écoute… Autant de remèdes pour maintenir ses salariés motivés. 

*Les prénoms ont été changés. 
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