Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 novembre 2022 1 28 /11 /novembre /2022 18:41

L’universalisme, idée ringarde ? Les droits humains, paravent du néo-colonialisme occidental ? L’identité, paradigme des temps nouveaux, qui ruine la prétention des démocraties du nord à offrir un modèle planétaire ? Cet air du temps plutôt malsain, cette antienne des faux réalistes, sont contredits avec éclat par l’actualité. Quoi de commun, en termes culturels, civilisationnels, identitaires, entre une mère russe, un étudiant chinois et une femme iranienne ? Rien sur le plan de l’éducation, de la religion ou de l’appartenance nationale. Pourtant les trois, au même moment, et pour des causes similaires, défient à mains nues, avec un courage inouï, les autorités de leur pays. Une grande partie des Russes, les mères en particulier, mais bien d’autres, protestent contre une guerre injuste imposée au peuple par un régime nationaliste et répressif. Une large fraction des Chinoises et des Chinois s’insurgent contre un enfermement arbitraire imposé au nom de la politique anti-Covid par un régime nationaliste et répressif. Une grande partie du peuple iranien rejette l’obligation faite aux femmes de porter le voile par une théocratie nationaliste et répressive. Nulle concertation subreptice, nulle intervention occidentale, nulle influence néocoloniale dans ces insurrections populaires et spontanées. Seulement la volonté élémentaire de vivre libre, de faire reculer l’arbitraire, de peser sur le destin de leur nation. La preuve est de nouveau faite : les droits humains ne sont pas une invention du Nord, une doctrine hypocrite agitée par les dominants, une manière oblique d’uniformiser le monde sous la férule occidentale. Seulement la révolte élémentaire d’une humanité qui souffre sous la botte des dictateurs, l’aspiration simple et irrépressible à la liberté. Un sentiment partagé sous toutes les latitudes, au sein de toutes les civilisations. Les droits humains sont le bien commun des opprimés. Et l’identité érigée en principe absolu, l’arme des tyrans.

LJOFFRIN

Partager cet article
Repost0
25 novembre 2022 5 25 /11 /novembre /2022 19:21

Éplucher les 3 000 articles parus en ligne depuis le numéro 4, « Gilets Jaunes : un assaut contre la société », fut une expérience troublante. Dérouler le fil de ces trois années écoulées, c’était aussi se confronter à la confusion, à l’écrasement et à la défaite, même temporaires. La résistance pugnace de la ZAD, le débordement de la gauche sclérosée lors de la loi travail, le cortège de tête qui réinvente la rue, l’audace des Gilets jaunes qui fait blêmir le pouvoir, et puis l’entonnoir de la pandémie, les attestations de sortie, l’enfermement chez soi, le resserrement partout, le pass sanitaire, le télétravail, la peur, la confusion. On aura rarement vu un horizon aussi brutalement réduit. Il a bien fallu croire au monde d’après, à ce que la suspension générale permettait d’enfin voir, le Covid-19 ne venait-il pas violemment et globalement nous dessiller quant à l’état général d’un monde que l’on avait méticuleusement œuvré à rendre invivable et mortifère ? Sauf que la lucidité est peu de chose, le pouvoir le sait, quand les dispositifs de contrôle et de discipline tiennent chacun là où il est, seul au milieu de tous. Et puis il y avait les écrans pour nous consoler et achever de nous décomposer. Nous n’avons certainement pas encore pris la pleine mesure de ce que l’épidémie de Covid a altéré en nous, dans notre rapport aux corps, aux autres, à la mort et de ce qu’elle est venue accélérer dans les techniques de pouvoir, la cybernétique et l’extraction de valeur à chaque instant, chaque clic.

Et puis nous nous sommes réveillés un matin de mars et l’état d’urgence pandémique était « terminé », nous n’étions plus en guerre contre le virus mais contre l’armée russe qui venait d’envahir l’Ukraine. Si l’élément déclencheur était tout autre, la sidération était à peu de chose près la même. Les experts en géopolitique se sont assis à la place des épidémiologistes et nous, nous sommes restés collés à nos écrans. La centrale nucléaire de Zaporija se fait bombarder tandis que Netflix propose désormais un tarif avantageux en échange de quelques publicités. Le prix des livres explose car les papetiers ne peuvent plus payer leur facture d’électricité et doivent désormais fabriquer des emballages pour Amazon afin de survivre. Il fait 30 degrés en octobre, c’est toujours ça de pris sur les 19 en intérieur que recommande le gouvernement.

Le gouvernement justement, qui a su se faire réélire malgré une détestation générale et au prix d’une fascisation extrême du débat public. Les élections ont joué leur rôle : produire le sentiment qu’une voix seule et isolée pouvait peser quelque chose, qu’il s’agissait donc d’être responsable, de jouer le jeu et de miser sur le moindre mal. Certains, y compris parmi nous, ont tenu à y croire. On n’est jamais mieux déçu que par soi-même.

Dans ce numéro de lundimatinpapier, nous proposons de prendre l’époque à rebours, de partir de tout ce qui, au cœur de la catastrophe, a tenu, résisté, percé et traversé l’écran de fumée de l’impuissance. Le soulèvement George Floyd au cœur de la pandémie et de la plus grande puissance économique mondiale, les parapluies de Hong Kong, les marées humaines au Chili, la rage au Liban et l’occupation du palais présidentiel au Sri Lanka. Nous avons essayé de récapituler tout ce qui pouvait nous servir de piste pour bifurquer. Tout ce qui, sachant qu’il n’y a plus rien à attendre, cesse d’attendre. Depuis nos sursauts comme de nos échecs, affiner et partager nos perceptions, nos analyses. Déblayer le champ de bataille pour distinguer la configuration des hostilités. Pour cela, s’entremêlent à dessein des textes théoriques ardus, des récits personnels aussi bien que de la poésie. Nous tenons cette conviction profonde que le sensible circonscrit l’éthique, et que c’est depuis l’éthique que se détermine la confrontation politique. On pourrait d’ailleurs le dire plus simplement : c’est parce que cette époque nous est insupportable que nous la combattons.

Notre pari reste le même. Par-delà l’immensité du désastre et la toute-puissance du monde de l’économie qui le soutient, l’ordre des choses n’a jamais été aussi branlant. Il ne tient même qu’à un fil : que nous acceptions tous et chaque jour un certain degré d’humiliation. D’être usés et utilisés, exploités et anesthésiés. Le capitalisme n’est finalement que cela : l’organisation méthodique et policière de l’humiliation, la mise en concurrence de la tristesse de chacun.

Notre parti reste toujours le même : depuis là où nous sommes, partir de nos refus comme de nos attachements pour trouver les moyens de se dégager des dispositifs de pouvoir tout en constituant des existences et des mondes que nous sommes prêts à défendre. Se faire confiance. Ne jamais oublier que la lucidité et la vérité ne se donnent pas mais se partagent. Que la tristesse, l’impuissance et le ressentiment sont toujours la marque d’une percée ennemie. Réfuter la gauche et ses illusions bon marché, la norme autant que la marge, l’avant-gardisme et ses satisfactions creuses. Partager les mots pour ce que l’on vit, les stratagèmes par lesquels on fuit. Bricoler des choses qui autorisent à en casser d’autres, provoquer les conditions propices à l’audace et au courage. Étendre l’autonomie, reprendre l’offensive.

Paris, Toulouse, Lyon, Rennes, le 27 octobre 2022

Partager cet article
Repost0
24 novembre 2022 4 24 /11 /novembre /2022 18:26
ÉTAT POLICIER : LE BLOC LORRAIN OFFICIELLEMENT DISSOUT 🔴
- La dissolution de l'association militante crée un précédent inquiétant -
«Ça y est, c'est tombé en Conseil des Ministres, on est dissout». Ce sont les mots du porte parole de l'association Le Bloc Lorrain, basée dans l'Est de la France. Il ajoute : «on va faire un recours au Conseil d'État. On a peur qu'ils se servent de ça pour faire une jurisprudence.»
En effet, dans un courrier daté du 21 octobre 2022 que nous avions pu consulter, le Bloc Lorrain était accusé par le Ministère de l'Intérieur de provoquer «à des manifestations armées ou à des agissements contre des personnes et des biens». Rien que ça.
Mais qui compose le Bloc Lorrain ? Quelles sont ses activités ? La structure est une association loi 1901 qui «regroupe environ 200 adhérents et adhérentes de tous les âges» nous explique son porte-parole. Le collectif se revendique libertaire, altermondialiste, écologiste. À la base, c’est «un groupe de potes, certains militent depuis 20 ans». «On s’est constitué en association en mars 2021, pour mener à bien certaines actions autour de la justice sociale.»
Depuis, le Bloc Lorrain n'a pas ménagé ses efforts. Des maraudes étaient organisées «toutes les semaines, à Nancy, Metz, dans toute la Lorraine». Désormais, il «y a des militants partout dans la région» et même «des sympathisants ailleurs». En deux ans, le Bloc Lorrain a distribué plus de 20.000 repas.
Le collectif réalise aussi des distributions de nourriture aux étudiant-es et vient en aide à des familles de réfugié-es. «On fait aussi des actions environnementales» nous explique le porte-parole. Par exemple, le groupe sort ramasser des tonnes de déchets jetés dans la nature. Des initiatives salutaires, en faveur du bien commun.
C’est un véritable «système alternatif de luttes» qui se met en place. Le Bloc Lorrain pratique l’entraide concrète et lutte dans la rue. «On manifeste aussi, évidemment, on tient les banderoles», ou encore «on milite aussi sur Bure, contre l’enfouissement des déchets nucléaires». Le Bloc Lorrain s’est aussi déplacé à Paris lors de grosses manifestations ou à Nantes lors de fêtes de la musique en hommage au jeune Steve, tué par la police.
C'est sur ce point que le gouvernement veut les attaquer. Le Ministère de l’Intérieur, qui est entré dans une frénésie de dissolution depuis deux ans, a tenté de détruire notre média Nantes Révoltée, puis des groupes de soutien à la Palestine, et un collectif antifasciste lyonnais. Auparavant, il avait dissout de nombreuses associations musulmanes, au nom de la lutte contre le «séparatisme». Des procédures d'exception contre les minorités et les opposant-es pendant qu'Éric Zemmour, condamné pour provocation à la haine raciale et proche de groupes néo-nazis violents, est invité sur tous les plateaux dès qu'il a envie de vomir son racisme à l'antenne.
Contre le Bloc Lorrain, il n'y a que des accusations floues, basées sur des intentions supposées. Par exemple le gouvernement accuse la structure de «valoriser les débordements» sur sa page Facebook, la diffusion de vidéos de manifestations, ou encore la dénonciation de la police. Dire la vérité est désormais interdit en France. Chaque publication ou commentaire sur Facebook semble scrutée, épluchée, pour en déduire que le collectif «incite» à la «commission d’actes violents». On peut difficilement faire plus mensonger : le Bloc Lorrain a organisé une manifestation à Nancy, contre sa dissolution le 29 octobre. Des centaines de personnes avaient défilé dans le calme.
Ce 22 novembre 2022, en Conseil des Ministres, un décret lunaire au nom de la Première Ministre et du Ministre de l'Intérieur a donc entériné la dissolution. Un précédent inquiétant, puisque les procédures contre Nantes Révoltée n'ont pas abouti et que les dissolutions visant les associations pro-Palestine et antifascistes ont été cassées par le conseil d'État. Avec cet arrêté contre le Bloc Lorrain, s'il est maintenu, c'est un palier qui est franchi. Demain, n'importe quel collectif militant peut être visé. Et après ? Il en va de la survie des maigres contre-pouvoirs qui existent encore en France.
Pour rappel, les procédures de dissolution ont été inventés dans les années 1930, en pleine montée du fascisme et de tensions militaires : il s'agissait de réagir aux nombreux groupes armés d'extrême droite, fascistes ou monarchistes, qui préparaient un coup d'État contre la République, commettaient des attentats et avaient attaqué le Parlement. Aujourd'hui, cette procédure est utilisée très largement pour anéantir les groupes d'opposant-es qui font vivre la vie sociale à l'échelle des territoires. L'usage s'est inversé.
Sur sa page Facebook, le Bloc Lorrain déplore : «La 180ème maraude n'aura pas lieu, l’énième ramassage de déchets ne se fera pas ce week-end. Nous n'existerons plus en tant qu'entité. Nous serons dans l'obligation de stopper nos activités, plus de messages, plus de réponses collectives, plus de compte bancaire, plus rien au nom de l'association. Nous ne pourrons plus nous rassembler tous ensemble sous peine de 3 ans de prison et 45.000 euros d'amende.»
Tout n'est pas fini, car un recours aura lieu au Conseil d'État, probablement dans plusieurs mois. D'ici là, une cagnotte est en ligne et le déroulé de la procédure sera expliqué sur le
Partager cet article
Repost0
24 novembre 2022 4 24 /11 /novembre /2022 11:07
- L'État s'embourbait à Notre-Dame-des-Landes -
C'était un automne de boue et de flammes, aux mois d'octobre et novembre 2012 dans le bocage nantais. C'était il y a exactement 10 ans. Le 24 novembre 2012, l’État battait en retraite. La gendarmerie était traumatisée, et la ZAD se transformait en zone libérée. C'était le début de la fin pour le projet d'aéroport. À l'époque, le village de Notre-Dame-des-Landes n'était pas encore célèbre et cette zone n'était encore pas un symbole mondialement connu des luttes contre les projets inutiles et destructeurs.
Le 16 octobre, les autorités sonnent l'assaut contre la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. Il s'agit d'expulser les occupant-es et détruire tous les lieux de vie, pour construire un aéroport. 2000 hectares de béton à la place de bocages, de zones humides, de chemins et de forêts. Cette offensive est l'acte inaugural du mandat de François Hollande, président socialiste élu quelques mois plus tôt. À l'époque, les communicants de la gendarmerie ont une idée de génie : appeler leur manœuvre : «opération César». Ils trouveront face à eux des irréductibles.
L'attaque est un véritable laboratoire pour des opérations militaro-policières de grande envergure sur le sol français. 1200 gendarmes et policiers interviennent, appuyés par deux hélicoptères et accompagnés d’engins de destruction. Les premiers jours, le choc est rude. Malgré une résistance acharnée, la gendarmerie progresse. Des barricades sont enfoncées à coups de grenades, des maisons sont éventrées par des tractopelles, des gendarmes spécialisés montent dans les arbres pour expulser les cabanes en hauteur. Le gouvernement déclare que tout sera vite réglé.
Mais en quelques jours, ce sont des milliers de personnes solidaires qui déferlent sur la zone. Le retentissement est incroyable. Les dons de matériel et de nourriture affluent de tout le pays. Les ondes radio sont piratées pour signaler la progression des forces de l'ordre. Des comités de soutien organisent des actions partout. Et des compagnies entières de gendarmes mobiles s’enfoncent dans la boue automnale, craignant d'être assaillis par quelques ombres mobiles qui surgissent au détour d’un chemin, d’un bois ou d’une barricade. Pour la première fois depuis longtemps, l’État n’est pas maître du terrain.
Après plusieurs semaines de guerre de position dans le bocage, une manifestation de réoccupation réunit 50.000 personnes qui reconstruisent ensemble des cabanes au beau milieu de la zone, le 17 novembre. Un petit village apparaît en quelques heures, dans la forêt de Rohanne. Des paysans amènent leurs tracteurs en renfort. Le gouvernement a déjà perdu, mais il ne veut pas le reconnaître.
Quelques jours plus tard, une nouvelle attaque, encore plus violente, est lancée. Les grenades sont envoyées en tirs tendus, des balles en caoutchouc traversent à l’aveuglette les rideaux de fumée lacrymogène, les détonations de grenades creusent des cratères au milieu des champs. Des centaines de blessés sont recensés en trois jours.
Samedi 24 novembre, le village construit le week-end précédent est toujours debout. Les affrontements continuent. Et au même moment, une manifestation s'empare des rues de Nantes. Alors que la résistance continue sur la ZAD, la préfecture est encerclée et les CRS tirent au canon à eau. Les images font la Une de l'actualité. Deux fronts simultanés, en ville et dans le bocage. C'est trop pour le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. L'opération est stoppée, 5 semaines après avoir commencé. Le pouvoir tente de sauver la face en créant une «commission de dialogue».
À partir de cette journée, la Zone À Défendre devient zone autonome, hors de l’État. Pendant des années vont s'expérimenter d'autres habitats, d'autres modes de vie. Jusqu'à l'expulsion massive organisée par Macron en 2018. Entre temps, il y a eu des quatre voies envahies, des manifestations massives à Nantes, des chaînes humaines sur la zone et des fêtes mémorables. Le mouvement obtient, en 2017, l'abandon de l'aéroport. Une victoire arrachée au pouvoir et à la multinationale Vinci. Une victoire qui était en germe dès le 24 novembre 2012. Quand César s'est noyé dans la boue.
10 ans plus tard, la bataille de Notre-Dame-des-Landes continue d'inspirer d'autres luttes. Et la zone est toujours bien vivante. Le 19 novembre 2022, au cœur de l'ancienne ZAD, 600 personnes étaient réunies sous un chapiteau pour fêter l'anniversaire de César. Des témoignages, un banquet, des chansons, et un slogan puissamment repris : «no bassaran». L'héritage de la victoire de Notre-Dame-des-Landes se retrouve aujourd'hui à Sainte-Soline contre les mégabassines, et ailleurs contre des autoroutes, des centres commerciaux, des mines ou d'autres projets destructeurs. Partout où le vivant se défend face au capitalisme.
Partager cet article
Repost0
20 novembre 2022 7 20 /11 /novembre /2022 10:05

«Il ne faut pas politiser le sport», a jugé Emmanuel Macron à deux jours du lancement du «Mondial de la honte» au Qatar. Affirmant que c’est lors de l’attribution d’une compétition à tel ou tel pays et non lors de la tenue de l’événement qu’il faut, si cela se justifie, s’émouvoir et dénoncer tel ou tel choix. Manière de renvoyer le sujet politique à son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, fervent partisan d’une Coupe du monde au Qatar. C’est un peu court et, pour tout dire, assez grossier comme façon de poser le sujet. Certes, c’est bien la très néfaste Fifa et non les joueurs qu’il s’agit de blâmer pour avoir fait de la politique (et bien sûr du business) en désignant, dans des conditions qui font l’objet de moult enquêtes pour corruption, l’émirat gazier comme pays organisateur de cette Coupe du monde, après la Russie de Poutine en 2018.

Comment s’en contenter ?

Mais une fois qu’on a dit ça, place à la ferveur populaire et au soutien des Bleus et puis c’est tout ? C’est oublier un peu vite que les sportifs – et les footballeurs ne font pas exception – ont eux aussi une conscience. Fin septembre, alors que la polémique montait, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, avait déjà tenu le même discours, réduisant l’événement le plus universellement suivi avec les Jeux olympiques d’été à un moment qui ne pouvait être que dépolitisé. Au même moment, et cela a continué depuis, le courage des sportifs iraniens témoignant leur soutien à la contestation croissante du régime démontrait que les sportifs savent parfaitement s’engager quand la situation l’exige. Dans l’histoire, les exemples ne manquent pas. Qu’il s’agisse du respect des droits humains, notamment ceux des homosexuels et des femmes, ou du sort des centaines de milliers de travailleurs migrants qui ont charbonné pour construire les infrastructures dans lesquelles les footballeurs vont gambader et le public les admirer, sans oublier la question écologique, les raisons d’être choqués par la compétition qui s’ouvre ne manquent pas. Certes, les travailleurs migrants sont moins mal protégés aujourd’hui qu’au début des chantiers, mais comment s’en contenter ?

 
 

Si les footballeurs sont invités à jouer au ballon et surtout à rien d’autre, il faut dire que l’exemple venu d’en haut n’est pas à la hauteur. La Fédération française de football regarde ses pieds à chaque fois qu’elle est interrogée sur les zones d’ombre de ce Mondial controversé. Emmanuel Macron a, lui, annoncé qu’il se rendrait sur place en cas de qualification des Bleus pour les demi-finales. Sa ministre des Sports s’est, elle, fixé le seuil des quarts pour aller au Qatar. On comprend donc parfaitement que les joueurs de l’équipe de France n’aient pas envie de se mouiller davantage que leurs responsables sportifs et politiques. A fortiori les joueurs payés des dizaines de millions d’euros par le Qatar pour jouer au PSG, qu’il s’agisse de Kylian Mbappé en France ou de Leo Messi en Argentine.

Politiser la victoire

Le capitaine des Bleus, Hugo Lloris n’a, certes, pas brillé par son sens de la communication lorsqu’il a affirmé qu’il ne porterait pas, au Qatar, le brassard One Love – arboré durant des matchs de qualification – parce que la Fifa ne l’autorise pas mais surtout – et c’est pire – parce qu’il faut selon lui «respecter le pays où l’on va jouer». On a d’autant moins envie de le blâmer que notre chef de l’Etat n’est pas plus courageux, mais on se dit aussi que si le sport n’est pas politique en soi, certaines situations justifient que même des sportifs posent des actes. Parce qu’ils défendent aussi des valeurs d’universalité et de tolérance, qui sont d’ailleurs régulièrement piétinées dans les stades occidentaux. L’annonce, tardive, par la fédération de dons à des ONG luttant pour le respect des droits humains apparaît comme un minimum.

Comme tous les présidents avant lui, Macron croise les doigts pour que les bons résultats d’une équipe de France au rendez-vous de cette Coupe du monde lui profitent politiquement. Cela apparaît bien dans les Bleus et l’Elysée, le documentaire de Mohamed Bouhafsi que diffuse France 5 dimanche soir. Ne pas politiser l’événement, jusqu’à l’absurde, mais politiser la victoire, jusqu’à la nausée, on a du mal à adhérer même si un boycott simplement sportif n’avait pas eu de sens alors que les relations économiques et géopolitiques avec le Qatar n’ont rien à voir avec celles que la communauté internationale entretenait, par exemple, avec l’Afrique du Sud du temps de l’Apartheid. Mais il y a des gestes symboliques – et il y en aura durant ce Mondial, soyons-en certain – qui peuvent marquer les esprits et pousser la Fifa à ne pas reproduire un choix aussi honteux.

Partager cet article
Repost0
20 novembre 2022 7 20 /11 /novembre /2022 09:55

La Coupe du monde s’ouvre au Qatar ce dimanche 20 novembre. Tous ceux qui, au prix de multiples arrangements, ont accepté de la lui confier, portent une immense responsabilité : des milliers d’ouvriers morts sur la conscience, un désastre écologique, un scandale politique.

 

Dans l’imaginaire collectif, la corruption évoque des enrichissements personnels, des valises de billets, des privilèges individuels. Personne ne songe jamais aux conséquences qu’elle génère pour la société.

De la même façon, si vous évoquez les dérives du football, vos interlocuteurs vous parleront gros sous, agents véreux, salaires astronomiques. À la rigueur, ils se plaindront du fait que quelques hommes malins ou talentueux s’enrichissent quand les supporters peinent à s’acheter une place au stade, un maillot, un abonnement.

Mais la Coupe du monde au Qatar révèle de façon éclatante que les petits arrangements ont des conséquences bien plus importantes que des profits individuels. Lors du désormais fameux repas de novembre 2010 à l’Élysée lors duquel se sont joués, entre autres, l’attribution de la Coupe du monde au Qatar et le rachat du PSG, les protagonistes ont-ils eu conscience du terrible engrenage dans lequel ils mettaient Doha ?

 

Michel Platini, Nicolas Sarkozy et Claude Guéant ont-ils imaginé qu’en poussant la candidature du Qatar, ils causeraient indirectement la mort de milliers de travailleurs sur les chantiers des stades ? Ont-ils réalisé le désastre climatique que la compétition engendrerait ? Le tout accompagné d’un signal politique calamiteux : si un album Panini des dirigeants de régimes autoritaires existait, l’écusson du Qatar y brillerait en bonne place.

Depuis l’attribution de cette Coupe du monde, nous avons donc tenté de documenter au mieux ces éléments. Les découvrir, les relire ou simplement les parcourir dans le récapitulatif qui suit permet de se rendre compte de l’ampleur de ce scandale mondial, dans lequel la France a joué un rôle central. Car oui, contrairement à ce qu’affirme le président Emmanuel Macron, il est aujourd’hui impossible de distinguer le sport du politique.

 

D’abord, il faut rappeler que l’attribution de la Coupe du monde au Qatar n’est pas un événement isolé. Nasser al-Khelaïfi, le président du PSG, a été mis en examen pour « corruption active » dans l’enquête judiciaire sur l’attribution des championnats du monde d’athlétisme au Qatar. En 2011, une société qu’il détenait avec son frère a en effet versé 3,5 millions de dollars au fils du président de la Fédération internationale d’athlétisme.

Mais n’allez pas pour autant voir de la corruption là où il n’y en pas ! Des SMS révélés par Mediapart ont montré que l’ex-numéro 2 de la Fifa, Jérôme Valcke, avait reçu en 2015 une montre d’une valeur de quelque 40 000 euros juste après un vote crucial sur le déplacement en hiver du Mondial 2022 : la justice suisse a classé sans suite l’enquête pour corruption.

Aucune sanction judiciaire non plus pour l’affaire de la villa que le président du PSG a généreusement mise à la disposition de Jérôme Valcke.

En France, la liste est longue des coïncidences qui intéressent la justice anticorruption. Au fil des années, nous avons découvert qu’après son départ de l’Élysée en 2012, l’ancien président a personnellement bénéficié dans ses affaires privées du soutien de l’État du Qatar. Redevenu avocat, il a aussi décroché des contrats avec deux grands patrons français, Lagardère (six mois après qu’un fonds qatari est devenu le premier actionnaire du groupe) et Bazin (ancien patron du PSG devenu patron du groupe hôtelier Accor), eux-mêmes soupçonnés d’avoir profité de la mobilisation de la présidence française en faveur du Qatar.

 

Plus récemment, nous avons révélé que l’ancien président avait même fait appel au Qatar en 2011, quelques mois après l’attribution de la Coupe du monde, pour régler une dette de sa campagne de 2007 qu’il n’avait pas épongée.

Et nous avons également relaté comment Pierre Sarkozy, fils de et DJ de son état, était en 2010 plus intéressé par Platini que par ses platines : il a été l’un des protagonistes de la vente du PSG au Qatar.

Comment préserver de tels secrets ? Notre dernier article détaille la façon dont Nasser al-Khelaïfi a demandé à son majordome, lorsqu’il était menacé d’une perquisition, d’aller en urgence faire le ménage chez lui et de brûler des documents compromettants.

Le Sunday Times a aussi récemment révélé que notre principal journaliste travaillant sur l’attribution de la Coupe du monde, Yann Philippin, comme certains journalistes anglais et au total une douzaine de personnalités, avait fait l’objet d’une surveillance et d’une tentative de piratage de la part de l’État du Qatar par le biais d’une attaque extrêmement sophistiquée visant à accéder à ses documents et ses messages.

Les conditions d’attribution de la Coupe du monde ne sont cependant pas le seul sujet d’intérêt des journalistes. Car il nous a ensuite bien fallu en documenter les conséquences. Et en premier lieu, les conditions dans lesquelles le pays s’est transformé en vue de la Coupe du monde : travail forcé ou non payé, cadences infernales sous des chaleurs extrêmes… Les travailleurs migrants ont vécu l’enfer.

Des milliers d’entre eux en sont morts, sans qu’il soit possible de déterminer leur nombre exact. (Retrouvez également notre portfolio sur les ouvriers migrants qui ont obtenu le droit de jouer au football une fois par semaine.) Le groupe français de BTP Vinci vient lui-même d’être mis en examen pour avoir généré des milliards d’euros « au détriment de l’humain ».

Outre les forçats des chantiers, notre envoyée spéciale Rachida El Azzouzi a également rencontré au Qatar des travailleuses domestiques invisibilisées et maltraitées dans l’intimité de foyers privés où elles sont recluses.

Mais les conséquences sont aussi à venir. Sept des huit stades construits sont climatisés, une aberration énergétique. Surtout, pendant le Mondial, un avion transportera toutes les dix minutes les supporters entre le Qatar et ses pays voisins. Chaque jour, plus de 160 vols à coût réduit seront proposés aux supporters résidant dans les pays voisins du Qatar pour aller assister aux matchs.

La promesse de neutralité carbone faite par le Qatar n’est pas crédible un instant, comme l’a expliqué le chercheur Vincent Viguié dans notre émission « À L’air libre » dédiée au Qatar, qui revient plus longuement sur l’ensemble des éléments cités dans cet article.

Mediapart

Partager cet article
Repost0
15 novembre 2022 2 15 /11 /novembre /2022 03:04
DE LOURDES AMENDES EN CAS DE BLOCAGES DE ROUTE ET D'OCCUPATIONS ?
– Le parti au pouvoir veut une loi punissant de 1 600€ «d'amende forfaitaire délictuelle» les «entraves à la circulation» –
En novembre et décembre 2018, le pouvoir a tremblé. En plus de manifestations émeutières dans les grandes villes françaises, des milliers de ronds-points étaient bloqués, des autoroutes et des péages paralysés, de grands centre commerciaux inaccessibles. Les Gilets Jaunes ont freiné les flux. Et le capitalisme ne fonctionne que grâce aux flux : le déplacement constant de marchandises, d'informations et d'êtres vivants. Quand tout est bloqué, la grande machine est enrayée.
Le gouvernement français est actuellement en train de faire passer la loi LOPMI au Parlement, qui signifie «loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur». Une batterie de mesures autoritaires dont on entend peu parler malgré leur gravité. Hausse massive du budget de la répression, attaques frontales contre les libertés restantes, militarisation toujours plus dure du maintien de l'ordre.
Et dans cette fuite en avant, le parti présidentiel veut généraliser les «amendes forfaitaires délictuelles». Créées en 2016, ces amendes permettent aux policiers de prononcer une sanction pénale en-dehors de tout procès. Le policier administre directement la peine, sans juge, sans débat, sans possibilité de se défendre. Avec la LOPMI, le clan Macron veut que ces «amendes délictuelles» soient très lourdes en cas de blocages de routes et d'occupations de lieux d'études. Il est clair que Macron se prépare à rencontrer des résistances lorsqu'il va s'en prendre aux retraites et autres conquêtes sociales. Il fait donc passer en prévision une législation qui permettra de frapper économiquement et massivement ses opposants.
À travers la LOPMI, Macron veut punir d’amendes de 500 à 1000€ les lycéen-nes et étudiant-es qui occuperaient leurs facs ou leurs bahuts. Un vieux rêve de la bourgeoisie : empêcher le monde étudiant de lutter et de s'approprier ses lieux d'études. Si la mesure passe, les autorités pourraient aussi considérer les Assemblées Générales et autres réunions comme des «occupations» et distribuer de lourdes amendes à des étudiant-es déjà précaires.
Autre projet, des amendes de 800 à 1600€ à ceux qui «entravent la circulation». Cela peut recouvrir une palette extrêmement large d'actions. Barrer une autoroute, mais aussi tout simplement marcher en-dehors des parcours officiels, occuper un rond-point ou monter une barricade, peuvent aussi être considéré comme des «entraves». C'est une atteinte dissimulée au droit de manifester, une de plus.
Dans sa guerre sociale, le pouvoir s'attaque au porte-monnaie. Qui peut se permettre de risquer des amendes aussi lourdes en période d'explosion des prix ? Et même avec des caisses de soutien, comment faire si des forces de l'ordre distribuent délibérément ces amendes exorbitantes en masse, de la même manière qu'ils en ont distribué des dizaines de milliers pendant le confinement ?
Après l'interdiction des manifs et les tirs de grenades, après les arrestations et les dissolutions d'associations ou de médias indépendants, après la réquisition de grévistes pour briser le mouvement des raffineries : l'amende pour blocage est un moyen supplémentaire qui frappe les économies des opposant-es, en plus de la répression physique. La marque d'une démocrature.
La LOPMI a été adoptée le 18 octobre en première lecture par le Sénat. Elle est actuellement débattue au Parlement.
Partager cet article
Repost0
12 novembre 2022 6 12 /11 /novembre /2022 12:29
TRAVAIL FORCÉ" : LE RETOUR DE L'ANCIEN RÉGIME
Le clan au pouvoir continue son travail de sape. La guerre sociale que nous vivons est d'une rare violence. Le nouveau mantra du pouvoir en place : remettre de force les gens au travail. Attaque délibérée contre le RSA et le droit au chômage, nouvelle loi raciste visant à aggraver l'exploitation des travailleurs exilés, les élites politiques pratiquent une véritable thérapie de choc. Une fuite en avant pour en finir avec le maigre système de redistribution des richesses la sécurité sociale, et organiser le retour du travail forcé au profit du grand patronat :
🔴 UN RSA CONTRE DES HEURES TRAVAILLÉES OBLIGATOIRES : Ce qui devrait être un droit inaliénable, garantir un "revenu de subsistance", en réalité une aumône de 565,34€ pour les personnes sans emploi, ni ressources est en passe de se transformer en un salaire misérable. Macron l'avait annoncé lors de la campagne présidentielle : "conditionner le versement du RSA à un minimum d'activité de 15 ou 20 heures par semaine". Cela avait fait bondir la gauche à l'époque. Les autorités sont prêtes à expérimenter ce dispositif anti-social. Des départements annoncent fièrement être candidats à l'expérimentation "RSA activité". Un travail hebdomadaire, obligatoire et gratuit sans cotisations ni le droit de se syndiquer. Un attaque digne de l'ancien régime, avec des travailleurs privés de droits, qui n'ont d'autres choix que d'effectuer des tâches ingrates, payées moins que le salaire minimum pour un travail équivalent à mi-temps. L'Etat prévoit de conditionner le RSA dans 10 "bassins d'emploi". Les départements du Nord, de l'Essonne et du Bouches-du-Rhône sont concernés.
🔴VERS UNE SUPPRESSION DU DROITS AUX CHÔMAGE ? : l'annonce paraît incroyable, car c'est un recul social sans précédent. Les sénateurs ont voté en catimini un projet de loi visant à supprimer des allocations chômage en cas de refus de CDI. En gros, deux refus d'un CDI dans une entreprise pour les travailleurs intérimaires ou en contrat à durée déterminée entraîneraient, de manière automatique, la perte des allocations chômage et la suppression totale des indemnités de précarité. Entre d'autres termes : travaille ou crève ! Qui pourra se permettre de refuser un job sous-payé avec des conditions de travail monstrueuses si le patron vous propose plusieurs fois un CDI ? Avec la menace de perdre toute allocation chômage en cas de refus ? C'est un choix entre travail forcé et plongée dans l'extrême pauvreté. La loi a été porté par le Sénat à majorité très à droite. Le texte doit revenir en commission mixte paritaire, où députés et sénateurs tenteront de s'accorder sur une version commune. Sans réponse dans la rue et à la hauteur, ce projet d'un autre âge risque de passer tel quel d'ici la fin de l'année
🔴 DES TITRES DE SÉJOUR "MÉTIERS EN TENSION" POUR LES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS, MAIS SOUS LA MENACE PERMANENTE D'UNE EXPULSION : C'est une mesure soutenue par les organisations patronales. La création d'un titre de séjour "métiers en tension" pour les travailleurs étrangers en situation irrégulière dans les secteurs qui peinent à recruter. Le gouvernement présentera une nouvelle loi ''asile et immigration'' à partir de janvier 2023. Le 2 novembre, le ministre du Travail Olivier Dussopt et le ministre de l'Intérieur soutenaient cette mesure raciste et pro-patron. Il s'agit de permettre à un l'employeur d'engager un salarié étranger à bas coût et de le virer au moment où l'activité dans le secteur diminuera. Un acte banalisé de violence sociale du quotidien. La mesure qui confine à l'ignominie : une fois le secteur de métier "hors tension" c'est à dire avec peu ou aucune offre d'emploi dans le-dit secteur, le travailleur exilé qui se sera vu accorder un titre de séjour "métiers en tensions" de 3 ans, 5 ans, 10 ans se retrouvera sous la menace immédiate d'être expulsé du territoire. Des travailleurs immigrés sans droit, en insécurité permanente, dont les patrons font ce qu'ils veulent, peuvent baisser les salaires, pendant que l'Etat s'octroie toujours le droit d'expulser ces mêmes salariés s'ils ne sont plus jugés ''utiles'' pour les exploiteurs. Une loi raciste faite par et pour les riches. Les personnes migrantes se verront dans l'obligation d'accepter les boulots les plus merdiques.
Alors que les écosystèmes s'effondrent, qu'il faudrait repenser l'organisation du travail, déserter les tâches inutiles et nocives pour l'environnement et le bien commun, les néolibéraux organisent le retour des travaux forcés. C'est une offensive terrible pendant que notre camp social est tétanisé, apathique. Historiquement le combat de la gauche s'est articulé autour du recul du temps de travail, pour le temps libre et l'émancipation de la classe ouvrière, la sécurité de l'emploie et la solidarité internationale entre les travailleurs. Aujourd'hui les capitalistes, à rebours de l'histoire de cette émancipation sociale, veulent nous voir retourner à l'ancien régime.
Partager cet article
Repost0
11 novembre 2022 5 11 /11 /novembre /2022 16:33
FASCISME TÉLÉVISUEL 📺
- "Je ne crache pas dans la main qui me nourrit" -
Scène d'une rare violence jeudi 10 novembre sur la chaîne du milliardaire Bolloré, dans l'émission poubelle de Cyril Hanouna. Le député NUPES Louis Boyard, invité pour parler des exilé-es qui risquent de se noyer en Méditerranée, voulait simplement expliquer que les milliardaires qui pillent l'Afrique sont responsables de l'exil des personnes qui tombent dans la misère à cause du vol des richesses de leur pays. Une idée simple.
Pourtant il n'a JAMAIS pu finir sa phrase en 10 minutes sur le plateau. «Je m’en bats les couilles que tu sois élu. Tu crois que j’ai peur de toi ou quoi?! (…) Espèce d’abruti (…) À l’assemblée dès que tu parles ils ferment ta gueule. T’es un abruti. (…) Tocard. (…) Bouffon. T'es qu'une merde», et autres hurlements. Devant 2 millions de téléspectateurs en direct. Et à la fin, un aveu du présentateur Hanouna, hors de lui : "je ne crache pas dans la main qui me nourrit".
L'élu a subi une salve d’insultes, de moqueries, d'intimidations physiques, de cris du public lui disant de dégager, avant d'être chassé du plateau. Malgré toute la bonne volonté du monde, ce député n'a pas pu mettre en cause le milliardaire d'extrême droite Bolloré.
On a beau de moquer de Trump ou des USA, cette scène est digne des réseaux les plus violents et réactionnaires des chaînes de télé pro-Trump ou pro-Bolsonaro au Brésil. Bêtise crasse et délibérée, violence verbale et menaces, humiliations, glorification de la force, de l'argent, du buzz. Et promotion des idées d'extrême droite. C'est littéralement du fascisme télévisuel. Du fascisme adapté au 21ème siècle.
Reste à savoir si les élu-es NUPES vont continuer à donner du crédit à ces émissions toxiques ou si, enfin, des moyens vont être mis en œuvre pour soutenir et créer de puissants médias indépendants et émancipateurs, qui auraient pour but de toucher les masses. Médias qui font cruellement défaut depuis des années en France. En attendant Mathilde Panot a promis de saisir l'Arcom, une bien maigre menace face au principal promotteur d'Éric Zemmour.
Montage : Caisses de grève et CA
Partager cet article
Repost0
10 novembre 2022 4 10 /11 /novembre /2022 16:11
"Le règne du matérialisme produit un monde narcissique où la vie se réduit à la possession et à la consommation. L'amour ne peut pas s'épanouir dans une culture narcissique."
"Quand la consommation cupide prévaut, la déshumanisation gagne en acceptabilité. Dès lors, il n'est plus seulement acceptable de traiter les gens comme des objets, mais c'est un comportement requis. C'est une culture de l'échange commercial, la tyrannie des valeurs du marché. Ces valeurs structurent la manière dont nous nous rapportons à l'amour."
"Une culture de la domination s'appuie sur la peur qu'elle cultive chez les individus, afin de garantir leur obéissance. Dans notre société, nous faisons grand cas de l'amour et nous parlons peu de la peur. Pourtant, nous souffrons toutes et tous d'une peur terrible la plupart du temps. Notre culture est obsédée par la notion de sécurité. Mais l'on ne se demande jamais pourquoi l'on vit dans cet état extrême d'anxiété et d'effroi. La peur est la principale force d'appui des structures de domination. Elle favorise le désir de séparation, le désir de rester des inconnu.es. Lorsque l'on a toujours appris à se sentir en lieu sûr dans la similitude, toute différence, quelle qu'elle soit, apparaît comme une menace. Lorsque l'on choisit d'aimer, on choisit de s'opposer à la peur, à l'aliénation et à la séparation. Choisir d'aimer, c'est choisir de se lier - de se retrouver dans l'autre."
Bell Hooks (1952-2021), militante et intellectuelle féministe noire.
Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : humeurs et passions
  • : coups de coeur, coups de gueule, coups de blues
  • Contact

Recherche

Articles RÉCents