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27 octobre 2022 4 27 /10 /octobre /2022 16:05

par Alexandra Schwartzbrod

publié le 26 octobre 2022 à 22h00
 

Interrogé lors de son entretien télévisé du 14 juillet sur le sobriquet de «Jupiter» qui lui avait collé à la peau durant son premier quinquennat, le chef de l’Etat avait reconnu – en toute humilité – qu’il se voyait davantage, à l’orée de ce deuxième mandat, en «Vulcain», le dieu du feu et de la forge. Force est de constater que le feu est bel et bien là, mais certainement pas à l’endroit où Emmanuel Macron l’imaginait. Il y a le feu à la majorité, où certaines voix – et non des moindres – se sont élevées publiquement contre une réforme des retraites imposée à la hussarde ou pour une taxe sur les super dividendes (retoquée par le gouvernement). Il y a le feu à l’Assemblée nationale où, lundi, une motion de censure a manqué la majorité absolue de 50 voix seulement. Il y a le feu au pays où une grève dans les raffineries et les dépôts de carburant a bien failli faire tache d’huile tant les colères et les revendications sont nombreuses. Il y a le feu à la planète et, même si le Président semble enfin avoir pris conscience de l’urgence climatique, les décisions et les mesures fortes – notamment à l’endroit des plus riches – se font encore attendre.

Cette interview sur France 2 consacrée aux «urgences françaises» tombait donc plutôt bien, il y avait en effet urgence à calmer le jeu ou au moins à donner quelques raisons d’espérer que Vulcain allait descendre de son nuage pour être au plus près et davantage à l’écoute des simples mortels. Las, après un début d’entretien qui se voulait très rassurant sur sa capacité à affronter «les crises», c’est un Président très énervé qui s’est exprimé pendant près d’une heure, portant une charge violente contre la Nupes, martelant ad libitum sa volonté de faire du pays «la France du travail et du mérite» et vantant le bien-fondé d’une réforme des retraites «essentielle si on veut préserver notre modèle social» qu’il compte bien mener à son terme malgré l’hostilité d’une grande partie du pays. Nicolas Sarkozy, sors de ce corps !

par Lilian Alemagna

publié le 27 octobre 2022 à 6h54
 

«Ce qui me met en colère c’est le cynisme et le désordre.» Eh bien ce qui nous met «en colère» après avoir écouté Emmanuel Macron, ce mercredi soir, dans L’Evénement, la nouvelle émission politique de France 2, c’est d’entendre un chef de l’Etat censé prendre de la hauteur, venir faire de la politique de bac à sable et raconter des fadaises. Non, les députés de gauche n’ont pas «port[é] une majorité avec des députés du Rassemblement national». Ils avaient leur propre motion de censure contre le gouvernement Borne après la décision de la Première ministre d’actionner le 49.3 sur les projets de budget et l’extrême droite en a profité pour venir voter leur texte. Ce qui sauve Borne, c’est le refus de la droite de provoquer une dissolution promise par le Président.

En France – contrairement à l’Allemagne qui n’a ni la même histoire, ni le même régime politique – il n’y a pas besoin de proposer une «majorité alternative» pour renverser un gouvernement. Les institutions sont assez simples : soit le président de la République repropose la même Première ministre ; soit il en change ; soit il renvoie tout le monde devant les électeurs et ce sont les citoyens français qui décident de la nouvelle «majorité».

 

Basse manœuvre politicienne

«Il n’y a pas, ni aujourd’hui, ni demain dans notre pays, une majorité alternative, a-t-il lancé. Car celle-ci repose sur l’incohérence, l’alliance des extrêmes.» Faux. En cas de législatives anticipées, le chef de l’Etat ne sait pas quelle allure aurait la nouvelle Assemblée. Et quoi qu’il arrive, jamais aucun député de la Nupes n’a affirmé qu’il s’allierait avec Marine Le Pen pour gouverner. On peut faire bien des reproches à Jean-Luc Mélenchon et ses troupes – notamment celui de ne pas dire qu’il fallait utiliser le bulletin de vote «Emmanuel Macron» pour empêcher Marine Le Pen d’accéder au pouvoir – mais pas celui d’avoir un programme très différent de celui de l’extrême droite et d’avoir combattu cette famille politique toute sa carrière.

C’est assez insultant, pour quelqu’un de gauche, d’entendre celui qui, tel un simple publicitaire, a pillé les slogans du Nouveau parti anticapitaliste au printemps – «nos vies valent plus que leurs profits» – ou de La France insoumise – «Un autre monde est possible» ou le concept de «planification écologique» – parce qu’il avait besoin de voix de gauche pour son second tour face à l’extrême droite, utiliser des éléments de langage à trois sous et raconter que les députés Nupes «étaient prêts […] à se mettre main dans la main avec le Rassemblement national». Insultant aussi d’entendre que Nupes et RN «se sont mutuellement aidés aux élections du printemps dernier». Qui n’a pas donné de consigne de vote lorsqu’un insoumis était au second tour avec l’extrême droite ? Qui a propulsé – sans que l’Elysée ne trouve à y redire – deux RN à la vice-présidence de l’Assemblée nationale ? Et d’où Emmanuel Macron sait-il que la motion de censure proposée par la Nupes a été «à dessein […] changé par cette coalition baroque» ? A-t-il des preuves ou bien reprend-il les arguments de ces socialistes qui refusent tout à la fois la Nupes - avec une stratégie à zéro député - mais n’ont pas assez de courage pour soutenir Macron ?

On a compris le but de la manœuvre : tenter de fracturer la gauche en vue de législatives anticipées. Récupérer une partie de l’électorat socialiste et écologiste, déçu de Macron et qui a voté Nupes en 2022 car – enfin – la gauche avait su s’unir. Distinguer les «bons» députés PS, EE-LV ou PCF des «vilains» LFI responsables du soi-disant «désordre» à venir dans le pays lorsqu’il décidera de dissoudre. «Le roi [est] nu», a déclaré Macron en conclusion de cette «colère». On pourrait lui retourner la phrase. Macron est nu : il n’a pas de majorité pour passer ses textes comme il le souhaite, la guerre de succession dans son camp a commencé, la droite à qui il a lancé un SOS ce soir ne veut pas s’allier avec lui et va se radicaliser... Pourquoi le chef de l’Etat cogne-t-il plus la gauche que l’extrême droite ? Peut-être craint-il que cette force politique, unie, puisse devenir une «alternative».

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